mardi 19 août 2008

La parthénogenèse : une reproduction sans mâle

La parthénogenèse : une reproduction sans mâle

Par enelh, professeure agrégée de biologie (SVT)

Je me permets de rebondir sur le dernier point évoqué dans l’article précédemment posé "l’homosexualité chez les animaux" : la parthénogenèse. Des mots grecs parthenos ("vierge") et genesis("naissance","génération"), la parthénogenèse consiste en la reproduction monoparentale à partir d’un individu femelle, c’est-à-dire en la formation d’un nouvel organisme à partir d’un gamète(cellule sexuelle) femelle non fécondé... En d’autres termes, en une reproduction sans necessité d’un individu male !... Et oui, cela existe ! Et ce mode de reproduction méconnu de la plupart(...allez savoir pourquoi... !) est très répandu dans le règne végétal et animal.

En effet, la parthénogenèse présente de nombreux avantages : ainsi, n’ayant besoin que d’un seul exemplaire de l’espèce (obligatoirement une femelle !) pour assurer une reproduction, les organismes parthénogenétiques sont plus capables de coloniser des habitats isolés comme les îles ; d’autre part, les lignées se reproduisant par parthénogenèse présentent une croissance démographique rapide (quand l’environnement est stable) et plus spécialement lorsqu’il s’agit d’une parthénogenèse thélytoque (parthénogenèse ne donnant naissance qu’à des femelles). En effet, dans ce dernier cas, comme les individus sont toujours des femelles, chacun pourra produire des oeufs qui écloront. Alors que dans les populations séparées en sexes, les individus mâles ne peuvent pas avoir de progéniture par eux-memes (c’est ce qu’on appelle le désavantage reproductif !). Autrement dit, une lignée parthénogenétique thélytoque aura, dans des conditions idéales, un taux de croissance démographique double par rapport à une population composée pour moitié de mâles...! Enfin, n’oublions pas que, lors d’une reproduction parthénogenétique, la progéniture est génétiquement identique ou presque (en cas de mutations) à sa mère puisqu’il n’y a pas de recombinaison génétique liée à une fécondation entre gamètes différents. Ce "clonage" naturel peut être très favorable si le génotype convient exactement à un environnement stable (mais peut être désavantageux si l’environnement change) : la population sera parfaitement adaptée à son habitat et pourra proliférer rapidement et durablement.

On rencontre la parthénogenèse chez de nombreux Invertébrés comme les insectes : par exemple, chez les abeilles et les fourmis, les mâles naissent d’ovocytes ( ovules) non fécondés ; mais comme l’indique l’article "l’homosexualité chez les animaux", la parthénogenèse existe aussi chez les Vertébrés. Chez certains lézards (15 espèces environ), la parthénogenèse apparait comme le mode exclusif de reproduction : la parthénogenèse nécessite alors un stimulus sexuel consistant à mimer entre femelles la conduite de l’accouplement (ce qui montre clairement que les caractéristiques morpho-sexuelles du mâle ne sont absolument pas nécessaires à la stimulation reproductive de la femelle...). Un cas de parthénogenèse a également été observé en 2001 dans un zoo américain où, pour la première fois, un requin-marteau est né dans un bassin dans lequel ne vivaient que trois femelles. Le même genre de parthénogenèse a aussi été étudié chez le dragon de Komodo. Ces exceptions soulèvent des questions importantes sur l’intérêt évolutif de ce procédé : les femelles d’espèces très variées savent et peuvent se passer de mâle pour se reproduire. Cela laisse de plus supposer que la parthénogenèse naturelle, jusqu’aujourd’hui inconnue chez des animaux plus évolués comme les mammifères, est possible. D’ailleurs, des expériences récentes ont abouti à la naissance d’une souris parthénogenétique et à la création d’embryons humains parthénogenétiques (détails dans un prochain article).

Ces expériences représentent une avancée exceptionnelle en termes de recherche génétique reproductive. Leurs résultats ont-ils pour autant été révélés au grand public ? Pourquoi la parthénogenèse naturelle n’est-elle pas enseignée ou évoquée dans les programmes officiels des collégiens et lycéens alors que la reproduction sexuée "femelle-mâle" y occupe une place importante ? La vision d’un monde vivant et se renouvelant sans mâle : inutile et même toxique pour les fondements qui régissent les alibis du patriarcat.

Publié le 12 août 2007 par Mauvaise herbe

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Des requins se reproduisent sans rapports sexuels

NOUVELOBS.COM | 23.05.2007 | 16:51

Une femelle requin-marteau a donné naissance sans qu’un accouplement ait eu lieu. Sa progéniture ne présente pas d’ADN paternel.

Un type de femelle requin peut se reproduire sans avoir de rapports sexuels, selon des recherches publiées mercredi 23 mai par des scientifiques, dans le journal Biology Letters, publié par la Société Royale Britannique. Des experts d’Irlande du Nord et des Etats-Unis révèlent qu’une femelle de la race des requins-marteaux a donné naissance sans accouplement à sa progéniture, qui ne présente pas d’ADN paternel. Les chercheurs ont fait cette découverte lorsqu’une naissance inattendue a eu lieu dans un aquarium au zoo Henry Doorly au Nebraska aux Etats-Unis en décembre 2001.

Pas de rencontre avec un mâle

Le nouveau bébé requin a dérouté le personnel, car aucune des trois femelles requin-marteaux du bassin n’a été exposée à un mâle requin-marteau pendant trois ans.

Le directeur de l’équipe de recherche de la Queen’s University de Belfast et le co-auteur de l’étude, Docteur Paulo Prodohl, de l’école des sciences biologiques, ont décrit les résultats comme "réellement surprenants". "Jusque là tout le monde pensait que tous les requins se reproduisaient seulement par le biais de rapports sexuels entre un mâle et une femelle, requérant l’embryon pour obtenir l’ADN des deux parents afin de permettre le développement total", a-t-il expliqué.

Réduction de la diversité génétique

Le Dr Mahmood Shivji, le co-auteur qui a conduit l’équipe de l’institut de recherches Guy Harvey de la Nova Southeastern University en Floride, indique, lui, qu’"à présent, il apparaît clairement qu’au moins quelques femelles requins peuvent passer d’un mode de reproduction sexuel à un mode de reproduction non-sexuel en l’absence de mâles".

"Malheureusement, cet évènement n’est pas bénin car il entraîne une réduction de la diversité génétique chez la progéniture puisqu’il n’y a aucune nouvelle variation génétique présentée du côté paternel", précise-t-il. Cette capacité de reproduction peu commune est appelée parthénogenèse et est observée très rarement au sein de petits groupes comme les oiseaux, les reptiles et les amphibiens. C’est la première fois qu’on observe un tel comportement chez les vertébrés principaux comme les mammifères ou les requins.