dimanche 23 mars 2008

La poésie est une arme chargée de futur - Gabriel Celaya

La poésie est une arme chargée de futur

Quand on n'attend plus grand-chose qui nous exalte à nous-mêmes

Mais que palpitent et s'affirment en deçà de la conscience.

La sauvage existence et l'aveugle présence,

Comme un pouls qui palpite dans les ténèbres

Martèle les ténèbres,

Lorsque l'on regarde en face

Le vertigineux regard pâle de la mort, Les vérités s'avancent

Les barbares, terribles cruautés de l'amour,

Cruautés de l'amour.

C'est la poésie des pauvres, la poésie nécessaire

Comme un pain pour chaque aurore

Comme l'air que nos poumons veulent à chaque seconde

Pour être et puisque nous sommes, dire un oui qui

Nous fasse hommes, dire un oui qui nous fasse hommes.

Car nous vivons à la force, et c'est à peine s'ils nous Laissent leur dire qui nous sommes

Alors nos chants ne peuvent être sans péché pure forme,

Nous touchons au fond de l'ombre,

Nous touchons au fond de l'ombre.

Maudite la poésie qui fut conçue comme un luxe Culturel par tous les neutres

Ceux qui font la sourde oreille, ceux qui gardent les mains propres, Maudite la poésie dont pas un mot

Ne s'engage, s'engage et compromette.

Je fais miennes les fautes, je ressens les souffrances,

Et respirant, je chante,

Chante et chante, et chantant au-delà de ma peine,

De mes peines personnelles,

J'avance, j'avance.

Je veux vous redonner vie, provoquer de nouveaux actes

Et calcule en cela ce que peut ma technique

Je me sens un ouvrier du vers, un ingénieur

Qui travaille avec vous en l'Espagne,

L’Espagne en sa puissance.

Ma poésie n'est pas goutte à goutte pensée.

Ce n'est pas une fleur, et pas un fruit parfait.

C'est ce qui est nécessaire et qui n'a pas de nom,

Des actes sur la terre,

Un cri vers l'horizon.

Car nous vivons à la force, et c'est à peine s'ils nous laissent Leur dire ce que nous sommes.

Alors nos chants ne peuvent être sans péché pure forme

Nous touchons au fond de l'ombre,

Nous touchons au fond de l'ombre.

Gabriel Celaya, poète espagnol (1911-1991), trad. P Pascal, 1970.

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