samedi 26 janvier 2008

Sea, sex and RMI, Le décret RMI : un train d’enfer

Sea, sex and RMI
Le décret RMI : un train d’enfer

source : collectif RTO
http://www.collectif-rto.org/spip.php?article613

vendredi 25 janvier 2008 par collectif rto
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* Dans quels cas va-t-on vérifier si votre train de vie est suffisamment misérable pour continuer à bénéficier du RMI ?, p1
* A partir de quel montant votre train de vie est celui d’un riche ?, p1
* Les éléments pris en compte dans le calcul de votre « train de vie » :, p1
* Enfin une mesure qui fera le tri entre les torchons et les foulards Hermès., p1
* L’inspecteur mène l’enquête :, p1
* Dernier conseil : avant de sourire hypocritement au contrôleur CAF, pensez à vos dents en or !,

Fini le lucre et les folles bacchanales ! La proposition de décret sur le train de vie des Rmistes vient de tomber, et fait tomber le dernier bastion de résistances après l’abolition des privilèges en 1789.

La fin d’un privilège ?

C’est grâce à l’enquête minutieuse du MEDEF et la complicité des partis politiques au pouvoir que l’affaire vient d’être révélée au grand public et que le gouvernement a pu prendre les mesures qui s’imposaient.

Dans quels cas va-t-on vérifier si votre train de vie est suffisamment misérable pour continuer à bénéficier du RMI ?

De ce côté, pas de grands changements. Les dispositions sont les mêmes que pour un contrôle CAF avec tout de même l’immense nuance que les éléments soumis au contrôle, sont étendus.

Par exemple, un bon citoyen, qui soupçonnait votre colocataire de ne pas dormir dans le canapé du salon, et vous dénonçait à la CAF pour concubinage non déclaré, pourra dorénavant le faire s’il trouve que le son de votre chaîne hi-fi est bien trop pur pour avoir été achetée aux puces.

Ou encore quand l’organisme qui vous suit pour votre contrat d’insertion demande à la CAF d’effectuer un contrôle car il trouve que votre attitude ne correspond pas à l’humilité que tout gueux se doit d’adopter, faites gaffe dorénavant de ne pas dire à votre référent que vous allez toutes les semaines à des projections de films spaghettis des années 70 pour vous distraire de cette vie morose. Dorénavant, le cout des loisirs est pris en compte pour le calcul de vos droits.

Et à savoir surtout, car c’est la source principale des contrôles, que les conseils généraux de chaque département fixent chaque année des publics cibles qui seront de toute façon contrôlés. Ce peut être, par exemple, les gens qui sont inscrits au RMI depuis une certaine date, ou ceux nés en 19XX.

Maintenant cela pourrait, peut-être, être ceux que l’on a déjà vu porter une bague ou des boucles d’oreilles, ou ceux qui sont inscrits au cours de judo de leur commune.

Désormais, un contrôle sur pièces ou à domicile pourra donc être déclenché dès lors qu’une suspicion sur votre train de vie, suspicion déclenchée par n’importe quelle information ( délation, recoupement de fichiers, ...) existera. Bien évidemment, la CAF n’a aucune obligation de vous révéler la source et l’origine de la suspicion.

Le décret précise qu’un questionnaire devra être rempli par l’allocataire. Il est donc fort probable que chacun d’entre nous le reçoive sous peu. Il faudra y répondre avec pièce justificative à l’appui. Combien tout ceci va coûter ? Mais quelle question !? Rien n’est trop cher pour l’égalité préconisée par notre chère république !

A partir de quel montant votre train de vie est celui d’un riche ?

Si les éléments pris en compte dépassent ou égalent le montant de la moitié de votre RMI annuel, vos droits seront purement et simplement arrêtés. Soit pour 90% des RMIstes, la somme mirobolante de 2351,52 Euros.

Si la valeur de votre « train de vie » correspond à ce montant ou lui est supérieur, le décret prévoit tout simplement de couper votre allocation et de vous demander les sommes que vous avez perçues indûment.Votre RMi pourra aussi être réduit si la valeur est inférieure.

Les éléments pris en compte dans le calcul de votre « train de vie » :

A peu près toutes vos possessions, mais également et surtout ce qui ne vous appartient pas !

En effet, rien ne précise dans le décret qu’il s’agisse de VOS possessions. Il est même précisé que « les dépenses sont celles réglées au bénéfice du foyer du demandeur ou du bénéficiaire pendant la période de référence ».

Que vous soyez locataire ou hébergé, un quart de la valeur locative annuelle sera prise en compte dans le calcul. On peut voir déjà que les RMIstes locataires ou hébergés dans des villes où l’immobilier est hors de prix comme Paris, dépasseront beaucoup plus rapidement le plafond. Un décret qui devrait plaire au Maire parisien qui cherche depuis son début de mandat à se débarrasser des pauvres de la Capitale.

Enfin une mesure qui fera le tri entre les torchons et les foulards Hermès.

Ajouter à cela :

- 80% des dépenses pour travaux, charges, frais d’entretien des immeubles, personnels et services domestiques (si vous avez besoin d’une aide ménagère par exemple).

- 80% des dépenses pour voyages, séjours en hôtels, locations saisonnières, frais de réception, biens et services culturels, éducatifs, de communications et de loisirs, club de sport et de loisirs (ils en ont après les loisirs), et même, s’il y a lieu, vos droits de chasse.

Bref, vos cours de ping-pong (attention, pour ceux qui se rappellent, à ne pas acheter des Secretin 5 étoiles), votre note de portable, votre inscription à une bibliothèque privée spécialisée dans les bouquins de SF, bref tout et surtout n’importe quoi.

- 80% de la valeur de l’électroménager, équipements son hi-fi vidéo et matériel informatique. Toujours.

Et quelques autres trucs mis là pour faire penser que les RMIstes sont vraiment des riches qui partent en solitaire sur les mers chaudes des Caraïbes : 6,25% de la valeur vénale des bateaux de plaisance, voiture, moto si la valeur vénale est de plus de 10 000 euros.

L’inspecteur mène l’enquête :

Affublé d’un imper vieux et passé, on voit déjà le contrôleur CAF surgir à chaque coin de rue pour vous poser une multitude de questions plus ou moins embarrassantes :

« Au fait, ne m’aviez-vous pas dit que votre mère était décédée, il y a peu ? HMMM… Mais alors, elle a bien du vous laisser un petit quelque chose ; pas d’argent bien sûr, nous l’aurions vu. En nature, voyez ? Un de vos voisins m’a dit qu’il avait remarqué que votre mère portait une broche en or. Non, ne vous inquiétez pas, ce n’est pas en rapport avec le contrôle ! C’est que voyez-vous, ma femme – oui, car j’ai le droit d’être marié sans que mes revenus soient revus à la baisse –, a le même genre de broche et elle noircit tout le temps. Ces objets précieux, c’est vraiment fragile, vous savez ! Alors si vous aviez un truc de grand-mère pour entretenir ce genre d’objet ? »

Le spectre du contrôleur CAF surgissant et vous prenant sur le fait durant votre leçon de yoga ou trouvant un polo Lacoste dans le recoin de votre placard, n’est pas loin. On se demande d’ailleurs comment de telles évaluations pourront être faites. Les contrôleurs CAF bénéficieront-ils du droit de procéder à des perquisitions comme la police ? Pour le moment, ce n’est pas prévu, bien que d’ores et déjà, certains n’hésitent pas à procéder ainsi, fouillant placards et salles de bain à la recherche d’une preuve de concubinage au mépris des droits des allocataires.

Pour le moment, les seules précisions concernant le calcul des biens sont :
- Le montant garanti par l’assurance
- L’estimation particulière effectuée par un professionnel
- La référence issue d’une publication professionnelle faisant autorité

Mais alors pour prendre le cas de l’auteur de cet article, la plupart des « objets de valeur » (télévision, ordinateurs, hi-fi etc.) dont je dispose, m’ont été offerts ou récupérés. Il faut, si l’on en croit le décret, n’offrir aux RMIstes que des serpillières ou quelques vieux tabourets de plastique sous peine de les condamner à l’arrêt de leur allocation. De même si vous disposez d’un grand appartement et que vous hébergez votre copain RMIste dans un coin du salon, peut-être que la valeur locative de votre appartement lui sucrera ses allocations. Etre à la rue ou ne pas l’être, toucher le RMI en dormant sous les ponts ou être hébergé sans allocation, voilà l’existentialisme du 21ème siècle..

Et ce décret va s’appliquer au nouveaux entrants. S’agit-il d’une mesure à venir, motivée par l’imminence d’un krach boursier et d’une crise économique sans précédent, qui va précipiter des millions de personnes dans la misère ? En tout cas une évidence s’impose : tous ceux qui ont eu un boulot pas trop mal payé, qui ont donc pu consommer, devenir propriétaires, faire quelques économies risquent de n’avoir pas droit au RMI, le jour ou un licenciement leur tombe dessus et qu’ils n’ont épuisé leurs droit au chômage.

Car tout ce qu’ils ont pu acquérir sera pris en compte dans le calcul.

Bref, après avoir travaillé plus pour gagner plus, ils n’auront plus qu’à tout perdre, et c’est seulement une fois dépouillés de leurs bien et totalement précarisés qu’ils pourront prétendre à une allocation de misère et accessoirement à la protection sociale qui va avec car ce décret s’applique aussi à la CMU.

C’est concernant les loisirs et autres subtilités que le décret reste fort obscur. Nul doute que des enquêtes de voisinage viendront compléter les « preuves ». Les contrôleurs pourront également compter sur l’aide des centres sociaux et associations d‘insertion qui, en créant une empathie artificielle, vous feront avouer vos méfaits : « Oui je l’avoue, j’ai mangé au restaurant cette semaine, mais juste une fois, et c’était le Mac Do ! »

En tout cas, il faut retenir les quelques « faiblesses » du décret. Elles ne seront utiles que par la lutte collective, car on le voit, ces « faiblesses » ne sont présentes que pour donner une impression de droits au peu de RMIstes qui liront ce décret. Il est probable que la CAF n’informe d’aucun de ses droits et fasse fi, comme l’ANPE, des obligations qu’elle se devrait de respecter avant d’entamer la procédure de contrôle.

Ce décret vise, on le voit, un public beaucoup plus large que ce que les médias laissent entendre.

Le point le plus important est la marge de manœuvre laissée aux départements pour la liste des publics ciblés par les contrôles. À plusieurs, on peut tenter de faire pression sur les conseils généraux afin qu’ils n’appliquent pas et ne demandent pas de contrôle.

Avant toute chose, vérifiez que vous ne risquez rien là où vous vivez, et faites des calculs d’apothicaire pour vérifier que vous ne dépassez pas le plafond. Sinon, déclarez-vous SDF si vous le pouvez, et faites-vous domicilier dans une association conventionnée. Ce n’est certes pas drôle de fréquenter ce genre de lieux, mais cela vous évitera de passer pour un nanti et vous toucherez 55 euros de plus, soit en tout 445 € de RMI au lieu de 390 €.

En principe, vous devrez être informé par lettre recommandée avec accusé de réception de l’objet de la procédure, de son déroulement et de ses conséquences. Il est peu probable que cette procédure soit respectée. La CAF et autres organismes ne respectaient déjà pas le fait qu’une personne devait être avertie, autrefois par courrier simple ou par téléphone. Mais c’est bon à retenir : cette « négligence » peut toujours servir, s’ils vous traînent devant les tribunaux.

Le décret le précise, vous pouvez être accompagné et assisté durant le contrôle et autres démarches liées à ce contrôle. N’hésitez pas à faire appel à une association de précaires. Le décret ne précise pas combien de personnes peuvent assister l’allocataire, donc autant être le plus nombreux possible ! Ça calmera probablement les ardeurs de l’enquêteur.

Il est précisé que si les valeurs sont utilisées dans le cadre professionnel, elles ne seront pas prises en compte. Jouez là-dessus : vous faites vos recherches d’emploi sur internet et par téléphone, d’où votre note élevée et la présence de matériel informatique ! Votre voiture est utile pour aller chercher du boulot à 40 kilomètres de chez vous, comme vous l’ordonne votre référent ou l’ANPE si vous y êtes inscrit. D’ailleurs, un Rmiste sur trois est aussi en emploi ( petits boulots précaires à durée déterminée le plus souvent ).

Le projet de décret précise que l’allocation n’est pas refusée en cas de circonstances exceptionnelles liées notamment à la situation économique et sociale du foyer, ou s’il a été établi que la disproportion a cessé (si vous avez vendu tous vos meubles ?). Qui juge de ces circonstances ? L’organisme payeur qui agit sur délégation du Conseil général en ce qui concerne le RMI, du moins. Et le Conseil Général ce sont des élus, pas des administratifs, donc des personnages publics sur qui une pression collective peut être mise ; notamment en dénonçant les résultats concrets de leur politique de contrôle.

C’est à eux que nous vous conseillons d’adresser vos courriers en double dès le début de la procédure

Et puis, c’est dingue mais on en est là, il va falloir retrouver les bonnes vieilles pratiques : en cas de contrôle CAF, comme en cas de visite d’huissier, on cache tout chez le voisin, chez des amis....

Dernier conseil : avant de sourire hypocritement au contrôleur CAF, pensez à vos dents en or !

- Pour lire le projet de décret cliquez sur le lien :
http://www.collectif-rto.org/IMG/pdf/decret_train_de_vie.pdf

PDF - 1.1 Mo

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